Tant pis pour HADOPI !
Après deux lectures et un passage devant la Commission mixte paritaire (CMP), l'Assemblée nationale a voté contre le compromis dégagé par les deux chambres. Le vote de jeudi avait pour objet simplement d'entériner les modifications apportés par la CMP et, ainsi, d'adopter définitivement la loi Hadopi. Il y a lieu, dès lors, de tirer un certain nombre d'enseignement de ce rejet.
Contrairement à ce qu'a
affirmé l'UMP, ce vote négatif n'est pas la conséquence d'un
mauvais coup joué par les députés socialistes qui seraient entrés
au dernier moment pour faire basculer la majorité, mais bien d'un
rejet implicite d'une part de députés UMP. L'instauration de la
"double peine" (suspension de la connexion et maintien du
paiement de l'abonnement par l'internaute) en CMP a poussé à
l'abstention nombre de représentants UMP, expliquant la singulière
démobilisation de leur camp au moment du vote solennel. Il s'agit
donc bien d'un vote de rejet par l'Assemblée nationale, notamment en
raison de l'absence volontaire de députés UMP, et pas d'une
fourberie du groupe socialiste.
Dans la minute, Karoutchi et
Copé ont annoncé l'inscription de la loi à l'ordre du jour, dès
le retour des vacances parlementaires. Le rejet du texte par
l'Assemblée nationale, en vote solennelle et en séance plénière
s'avère dont n'être qu'une simple péripétie à laquelle
l'exécutif (Karoutchi) peut remédier en quelques instants et sans
aucun scrupule. Dès lors, souvenons nous qu'on nous a vendu la
révision constitutionnelle en prétendant qu'elle allait renforcer
le rôle du Parlement dans la Vème République et rions jaune. Après
le temps de parole guillotine, après le redécoupage électoral
organisé dans l'arrière cuisine du boucher Alain Marleix, voici un
nouveau mauvais coup porté au Parlement par ceux là même qui
prétendaient le remettre au centre du jeu institutionnel.
Il
faut aussi voir dans ce vote une conséquence de la Vème République
hyperprésidentielle. Les députés, à force d'être négligés, à
force de constater que tout se joue à l'Elysée et que les
divergences de points de vue qu'ils formulent y sont interprétées
comme des défiances, sont probablement lassés de se voir imposer
des arbitrages qu'ils n'approuvent par forcément. Souvenons nous du
précédent sur les OGM, où l'UMP avait été mis en minorité, où
Jean François Copé avait été tancé par le Président et où les
députés de la majorité lui avaient offert une standing ovation à
son retour. De tels blocages vont probablement se répéter car ils
caractérisent, eux aussi, la marginalisation du Parlement, dans un
système politique favorisant la centralisation des pouvoirs autour
d'un seul homme.
Saluons enfin une nouvelle victoire
pour le groupe socialiste à l'Assemblée : ce n'est que
l'aboutissement de près de 40 heures de débats sur le numérique.
Mais ce vote fait suite au report de la loi sur l'audiovisuel, à la
fronde des députés socialistes sur le temps de parole en séance.
L'opposition est bien présente à l'Assemblée.